|
|
CÉLÉBRITÉS
DES TOURNANTS |
|
|
|
|
 |
Forcément,
la rue Rovigo était connue de tous à Alger : elle ondoyait,
une vraie danse du ventre. Mais malgré cette liberté,
elle savait garder une retenue de grande dame. Pensez donc ! Sur une
portion de moins de cent mètres, elle donnait refuge discrètement
à des talents : une cantatrice, Irène Jaumillot ; un
champion de France cycliste, Roger Gaignard ; un chevalier Jean Ghenassia,
qui s'illustra dans un autre genre, aux côtés de Roger
Degueldre
Un peu plus bas, passait parfois Albert Camus venant
visiter un vieil instituteur
Mais sur le trottoir d'en face,
vivait un autre artiste qu'on pouvait croiser certains matins, tôt.
Avec sa mallette et son chevalet, il prenait les ruelles de traverse.
Les longs tuyaux noirs et orangés étaient déjà
déroulés pour leur nettoyage à grands jets, et
Camille Bonnaire sautait par-dessus pour esquiver les giclées
des réparations de fortune. Dans le même temps, du ciel
transparent, aussi bleu que le regard d'une fille du Nord et presque
plus envoûtant, tombait une averse de cris de martinets. Les
chats de madame Charetier filaient, aplatis le long des murs et un
quilo, vautré dans une embrasure, aspergé, ne sortait
pas de sa douce torpeur.
Il y avait
aussi un autre concert : un cliquetis de casseroles dans les cuisines, du
Tino Rossi ou un tango sur Radio-Alger. Le tout ponctué par des rires
souvent sans raison ou l'appel d'une voisine pour un peu de spigol
Tout un humanisme qui n'avait pas besoin du Café de Flore pour transcender
la vie. Mais cet homme va vers une autre lumière. Toute cette ambiance
cachée le met déjà en fête ; et tout à
l'heure, quand il peindra un morceau de blancheur de la ville, c'est plus
que le soleil qui jaillira de ses pinceaux mais cette joie des ruelles,
tout aussi chaude et joyeuse. Il célébrait ainsi un mariage
qu'il était un des rares officiants à pouvoir glorifier. Sortant
de l'ultime fraîcheur du square Bresson, il descend les escaliers
pour plonger dans la darse qui mijote son plein de lumière. Et la
chaleur fait déborder jusqu'à lui ses relents de futaille
et de poissons secs. Plus bas, il retrouve, heureux, l'air qui tremble et
qui porte des soupçons d'odeurs de goudron et du bois chaud des barques
bleues et vertes allongées sur le quai de la Pêcherie. Une
pastéra passe avec des hoquets ; le type debout au milieu lui fait
un signe. Ce geste qui sera un jour encadré dans un appartement d'exil
Bonnaire plante son chevalet à l'épicentre de cette splendeur
Par à-coups, une brise saute la jetée et remue sa toile et
les fanions du sémaphore. De L'Amirauté dont le phare étincelle
mieux qu'en pleine nuit. Le ciel déborde à son tour et tombe
dans l'eau ; les coques devant vacillent et mélange le tout. Bonnaire
prend juste ce qu'il faut de ces éléments et sur sa toile,
le temps ne passe plus, la beauté se métamorphose et deviendra
plus qu'un souvenir. Mais la tragédie n'est jamais totalement assoupie
au bord de la Méditerranée. Ce peintre est à la fois
toro et toréador, dans cette arène où toujours la lumière
dansera un pas de deux, ombre et or, avec une menace. Alors, dans l'enthousiasme
d'une ville qui croyait conjurer le destin par tant de beautés, forces
immuables qui n'en finissent jamais de nous faire croire à l'impossible.
Ses yeux brûlent dans cette eau qui brise le soleil menu pour en recouvrir
les corps. Cette eau que nous prenions dans nos mains, sans rien retenir
de l'avertissement de sa fuite. |
|
Et Bonnaire, dans cette immense vibration,
témoigne avec les gestes saccadés d'une faena où seuls
les hommes seront assurés de mourir. Devant Alger, il peint Pompéi.
Aujourd'hui que les cendres ont recouvert notre monde, sa peinture nous
rappelle cette joie grave que même le soleil ne fera plus revenir;
peut-être seulement accélère-t-il aujourd'hui sa décomposition...
Au fond, sur la toile ou dans quelle ville ? passe un bus ou un tram qui
emporte un voisin qu'on aurait aimé saluer ce matin, un ami ou une
fille... ou peut-être un autre homme, l'étranger de Camus...
Un jour, un passant lui avait acheté, sur le tas, son tableau à
peine achevé. Le gars était parti, le tenant religieusement
serré entre ses paumes ouvertes. Et Coco Bonnaire était resté
heureux et triste, dans l'âpre odeur mêlée du ponton
surchauffé et des cordages pourrissants qui n'arrivaient pas à
dissoudre les traces d'eucalyptus venues des Quatre-Canons peut-être,
coups d'encensoir pour des gestes sacrés. |
Luc
BOIVIN |
|
|
La
ville d'Alger vue par Camille BONNAIRE. |
|
|
|
|
|
|
Michel
CASALTA était une des célébrités des Tournants,
ses motos (Matchless, Norton) puis plus tard ses "stock-Cars",
étaient
connus de tous.... Il
demeurait 100, rue Dupetit-Thouars et son garage se trouvait 5, avenue
Gandillot entre les escaliers Sampiero-Corso et l'épicerie "la
petite Niçoise" de madame Polito.
Parmi
tous les titres de champion qu'il remporta sur les pistes d' Algérie
et de Métropole, soulignons celui de Champion
de France de Stock-Car en 1961...
Nous
devons à sa dernière fille Janine (La Puce...) ces documents
sauvés de l'exode.
H.C.
CASALTA...
ça claque comme une 35O... Un M d'argent ailé sur le réservoir
de la Matchless noire.
Dimanche, course carrière Jaubert, ou à la Cressonnière,
au Caroubier... Il remonte les tournants, modére ses accélérations
par respect pour le voisinage. La rage, il la réserve pour les
lacets des quatre canons. Sillage de ricin sous les eucalyptus. Il fignole
la carburation.
La moto brille avenue Gandillot, des gamins admirent. Lundi, sûrement,
aura-t-il retrouvé son sourire sévère. Elle, ne sera
que boue ou poussière devant le garage. C'est au tour d'une coupe,
sur l'établi de luire.
L.B. |
|
|
|
|
|
|
But-club, miroir des
sports" du lundi 11 juin 1956 : "Roger Gaignard a créé
une belle surprise. Partant en tête dans les deux manches, il règle
Jacques Bellenger. Ainsi, l'ancien clown musical a remporté son
premier titre de champion de France professionnel."
C'était au Parc des Princes. Une belle surprise pour les parisiens,
mais pas pour nous qui avions la chance de voir passer Gaignard, enlevant
les "tournants Rovigo", stylé comme Koblet, son vélo
chromé . Miroitement d'éclats de soleil de notre rue
La famille Gaignard demeurait en face du café qui faisait le coin
avec la rue Voirol ; ce café où le grand Marcel "castagnait"
Tony Zale au-dessus du zinc, sur une immense fresque sépia. Le
café de la Victoire
Les Gaignard : sur piste mais aussi sur
scène, une famille d'artistes. Il doit bien rester d'ailleurs à
quelques uns, le souvenir de ses clowns musiciens, père et fils,
qui les "régalaient de rire" à l'Opéra.
L.B.
|
|
|
|
|
|
Compil de journaux d'Alger par L. LEGRAS "Le cyclisme Algérois de 1919 à nos jours (1961)" Album n° 4 offert par Anita ZELASCO/PAZ. |
Gérard GUERCY, né en 1925 habitait rue Pirette. Il est décédé à Toulon le 30 mai 2009... |
|
|
|
|
|
Le 19
novembre 1957. |
|
|
Cher monsieur Germain,
J'ai laissé s'éteindre
un peu le bruit qui m'a entouré tous ces jours-ci avant de venir
vous parler de tout mon cur. On vient de me faire un bien trop grand
honneur, que je n'ai ni recherché ni sollicité. Mais quand
j'en ai appris la nouvelle, ma première pensée, après
ma mère, a été pour vous. Sans vous, sans cette main
affectueuse que vous avez tendue au petit enfant pauvre que j'étais,
sans votre enseignement, et votre exemple, rien de tout cela ne serait
arrivé. Je ne fais pas un monde de cette sorte d'honneur. Mais
celui-là est du moins une occasion pour vous dire que vous avez
été , et êtes toujours pour moi, et pour vous assurez
que vos efforts, votre travail et le cur généreux
que vous y mettiez sont toujours vivants chez un de vos petits écoliers
qui, malgré l'âge, n'a pas cessé d'être votre
reconnaissant élève. Je vous embrasse de toutes mes forces. |
|
Monsieur
et ... |
Albert
Camus. |
...madame
Germain,
du 6 rue Rovigo. |
Monsieur
Germain, l'instituteur d'Albert Camus, habitait "les Tournants",
et la lecture d'un livre de son célèbre élève
(" Le premier homme"), me fit prendre conscience que nous avions
peut-être été voisins dans notre cher quartier.
Un ami intime de mes parents, Camille Gonzalès, m'ayant envoyé
quelques photos sauvées de l'exode, me renseigna involontairement..
Au dos de l'une d'elles était écrit : "Mme Germain, 6
rue Rovigo", la même adresse que Camille ! Je réalisais
alors que nos chemins avaient dû se croiser. Camille vint à
mon secours :"J'habitais au dessus de Mr et Mme Germain, et je sais
où habite aujourd'hui son beau-fils, Christian Dorchain". C'est
ainsi, que maintenant, avec la coopération de celui-ci, je peux illustrer
la lettre qu'Albert Camus écrivit à son instituteur au lendemain
de sa consécration. |
|
|
|
IRÈNE
JAUMILLOT ( 1938-1994 )
Irène Jaumillot est bien , à jamais, une célébrité
du quartier Rovigo. Elle a été pleinement de ce quartier :
née en 1938 au 4ème étage du 55 rue Rovigo (à
l'époque, on naissait à la maison!) , elle y a vécu
jusqu'en 1958, quand sa carrière nationale l'a appelée à
Paris - mais les siens y sont restés jusqu'en 1962. Quatrième
d'une famille de cinq enfants, elle avait deux frères et deux surs.
Nous étions voisins de palier. Toute notre enfance, jusqu'à
l'adolescence, s'est passée à jouer dans ce périmètre
magique, ce fameux palier, prolongé par les marches d'escalier qui
menaient à la terrasse de l'immeuble, qui pour nous, était
le Toit du Monde...
Lorsqu'Irène, qui a grandi dans une famille "folle d'opéra"
(et d'opérette aussi!), a commencé à étudier
le chant, je l'accompagnais souvent au piano, soit chez elle, soit chez
moi, toutes portes ouvertes... |
 |
A partir de 1954, après
l'acquisition d'électrophone (ou "pick up"), on écoutait
avec passion nos chanteurs favoris... en chantant en même temps,
bien sûr ! On ne gênait personne : on avait la terrasse au-dessus
de la tête, et la baie d'Alger à nos pieds...
Mais, Irène , jeune fille modeste et discrète au point d'être
effacée -une rareté dans le Quartier ! - allait devenir
une célébrité, algéroise d'abord, nationale
ensuite. Après de brillantes études au Conservatoire d'Alger,
elle allait faire une entrée fracassante - reçue première
à l'âge de 17 ans -au Conservatoire national de Paris...
3 ans plus tard, elle était à l'Opéra de Paris la
Marguerite du Faust de Gounod - la première, a-t-on dit, à
avoir l'âge du rôle -...Elle allait être aussi une bouleversante
Micaëla dans Carmen, etc... A Alger, elle vint nous donner, en 1959
puis 1960, ses premiers rôles sur notre scène : d'abord le
brillant mais second rôle de Musette, dans la Bohème de Puccini,
puis, celui de l'héroïne elle-même de cette pièce
: Mimi. Ce fut un triomphe mémorable , à chaque fois.
Irène était la gentillesse personnifiée, reconnaissante
envers ses professeurs, aimant ses camarades, dévouée aux
siens animée par un esprit de sacrifice. Elle fut aussi une femme
courageuse, face à un Destin contraire qui ne la ménagea
pas, sur aucun plan. Elle fit face, avec une ténacité placide.
Elle nous fut enlevée en septembre 1994, par une impitoyable maladie
qui n'avait pas réussi à altérer son âme. "
Anges purs, anges radieux, portez mon âme, au sein des Cieux...
" A - Dieu, Irène ! Tu fais à jamais honneur à
notre rue Rovigo !
Pierre DIMECH |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Irma
OLÉO, professeur de Solfège et Piano aux Beaux Arts d'Alger,
demeurait 20 rue Levacher.
Elle a vu défiler dans sa longue carrière des milliers d'élèves,
dont certaines ont fait le Conservatoire à haut niveau.
Elle
est décédée en 1975 et repose à Lirac (Gard).
Beaucoup se souviendront d'elle, c'est un hommage à lui rendre,
de la part de Colette CRÉMOND. |
|
|
|
|
|
|
Chronique algéroise... Souvenir ! |
|
Alger, 1902.
Cette année-là, une étoile est née!
Léonide Sportiello ! Elle voit le jour le cinq décembre,
au 13 de la rue Dupuch. C'est une longue artère algéroise
en dessous des "Quatre Canons". Elle part du carrefour
Berthezène, Gouvernement Général et Telemly
pour aboutir, dans son parcours en toboggan, au bord des Tournants
Rovigo qui grimpent vers les hauteurs de la ville jusqu'à
Barberousse. Léonide est la deuxième enfant d'une
famille qui en compte quatre. Il y a Anna, Françoise-Libéra
et Nicolas, puis le cercle s'agrandit de deux jeunes garçons,
Antoine et Joseph Olivier. Ils sont orphelins d'une branche parentale
proche et la maman des quatre susnommés, Marie Joséphine
Sportiello, née Ciavalino-Oliveres, leur ouvre son cur
et sa maison. Le père de cette fratrie est Charles, Gaétan
Sportiello. Il est photographe de métier mais a une passion:
le chant. C'est un des meilleurs ténors de la Lyre algérienne
où sa fille Léonide aime l'accompagner. Elle adore
l'opéra, a un joli timbre de voix et c'est tout naturellement
qu'elle rentre à l'école de musique d'Alger dirigée
par M. Aubine - le conservatoire n'existe pas encore - poursuivre
un cursus centré sur le |
|
solfège, la déclamation,
la mise en scène, le piano et bien entendu le chant avec Mme Cécile
Grill qui la chaponnera dans son parcours artistique de départ.
En 1928 elle obtient un premier prix de chant et entame alors une carrière
prometteuse comme soprano lyrique dans le monde du théâtre:
Opéra, Opéra-Comique et Monnaie de Bruxelles. Mariée,
c'est sous son nom de cantatrice "Olivier-Sportiello", après
ses triomphes algérois et oranais, que toutes les grandes villes
françaises dont Marseille, Bordeaux, Toulouse, Lyon, Clermont-ferrand
et bien d'autres, lui ouvriront leurs bras. Elle chantera en Belgique et
en Suisse où en 1941 à Genève, elle donnera le coup
d'envoi d'une finale de football : le "Servette" contre les "Young
Boys". "La Olivier-Sportiello" comme aiment l'appeler avec
affection ses admirateurs, de sa voix unique à la fois chaude et
naturelle, survole alors le répertoire des grands classiques de l'
Opéra.
Elle sera la courtisane dans Thaïs, la Salomé d'Hérodiade,
la Mathilde de Guillaume Tell, la Marguerite de Faust. .. Dans la tétralogie
wagnérienne, elle jouera le rôle de Sieglinde dans la Walkyrie.
Toujours à la recherche de la perfection, elle sera Manon, Mimi,
Buttertly... Inoubliable dans la Tosca, elle chantera avec les plus grands
ténors et barytons de l'époque: Laurizt Melchior, Georges
Till, José Luccioni, Saint-Crique et Nougaro, le père de Claude
! A chacun de ses retours sur la scène algéroise, c'est un
triomphe. Lohengrin, Tannhauser, Othello ! Elle est sollicitée par
toutes les grandes places européennes et envisage même un départ
vers les Etats-Unis. .. Pourtant, dans les années cinquante, cela
fait plus de vingt ans qu'elle chante et la nostalgie de son pays, l' Algérie,
est la plus forte. En pleine gloire elle décide de tout stopper et
revient à Alger. Elle habitera au 17 de la rue Berthezène.
En mai 1958, Léonide Olivier-Sportiello sera avec les partisans de
l'Algérie française sur le balcon du Gouvernement Général
et chantera une Marseillaise émouvante. Quelques années plus
tard, en 1962, meurtrie par la manière dont la France brade son pays
natal, elle s'installera avec son mari à Marseille puis à
Nice où ses yeux se fermeront le 23 août 1987.
Dans notre famille que le vent d'un exode forcé a éparpillé
aux quatre coins de l'Hexagone, lorsque nous avons la chance de nous retrouver,
nous nous souvenons avec émotion de son charme souriant, de sa gentillesse,
de son élégance, qui ont fait de Léonide Olivier-Sportiello,
une parente proche, une grande et merveilleuse cantatrice née en
1902, au 13 de la rue Dupuch, à Alger.
Robert Puig |
|
|
|
|
|
|
Léonide Olivier-Sportiello : une magnifique artiste Pied-Noir de l'Opéra, l'Opéra Comique et de la Monnaie de Bruxelles.
Née à Alger au 13 de la rue Dupuch, elle accomplit une importante carrière européenne de soprano lyrique entre les années 1928 et 1950.
Robert Charles PUIG
|
|
Mme OLIVIER-SPORTIELLO, Soprano Lyrique.
Une carrière heureuse et brillante à l'image de cette
belle artiste algéroise.
On s'étonne encore aujourd'hui de la retraite discrète que
s'est imposée, voilà bientôt dix ans, Mme Olivier-Sportiello,
qui a brutalement quitté la scène en plein succès.
La divine est toujours celle que nous avons connue, amincie, son beau
masque de Minerve intact dont le regard bleu-vert surprend, avec un sourire
d'un charme infini Tous les Algérois se souviennent de sa sculpturale
plastique et de sa beauté quand elle apparaissait dans la courtisane
Thaïs ou la danseuse Salomé d'"Hérodiade"
sur notre première scène, et du charme de sa voix.
A l'évocation d'aussi beaux souvenirs si récents, à
la retrouver telle qu'en elle-même
, je ne manque pas de lui
marquer mon étonnement.- "Oui, me dit-elle, peut-être
ai-je voulu m'arrêter avant toute défaillance possible et
laisser le meilleur souvenir. Des circonstances familiales m'y ont aidé.
Ma santé c'était altérée. Mais j'en ai beaucoup
souffert. J'avais plus de vingt ans de carrière bien remplie et
la vie de théâtre est extrêmement fatigante. J'avais
besoin de repos et j'ai maintenant retrouvé tout mon équilibre".
Premières études
D'une famille algéroise dont la papa était ténor
amateur à la "Lyre Algérienne", Léonide
Sportiello, Léo pour les intimes, épousa toute jeune M.
Antoine Olivier qui sut régler administrativement, plus tard, toute
la carrière de sa femme. Elle reconnaît tout lui devoir comme
elle rend hommage à Mme Céleste* Grill, son éminent
professeur de chant que nous avons eu pendant des années à
Alger. En effet, Mme Grill qui nous vint toute jeune de l'Opéra-Comique,
a formé pendant un demi siècle des élèves
qui ont fait carrière comme Jane Pons, Ninon Vanni, Georges Vaillant,
François Gatto, etc
Douée d'une jolie voix naturelle
et passionnée d'opéra, la jeune Mme Olivier-Sportiello fut
encouragée à travailler sérieusement le chant. C'est
à l'école de musique d'Alger, le conservatoire n'existait
pas encore, dirigée par M. Aubine, qu'elle travailla le solfège
avec Mlle Goujon*, la déclamation avec Mme Paule Granier*, le piano
avec Mme XXXX*, la mise en scène avec M. Bracco* et le chant avec
Mme Cécile* Grill qui pratiquait la méthode italienne, seule
vraiment efficace.
Elle obtint un premier prix en 1928 et Mme Grill qui savait les possibilités
de son élève, l'emmena à Paris auditionner à
l'Opéra-Comique. Les directeurs d'alors, Ribou* et Masson voulaient
l'engager sur-le-champ, mais la jeune femme ne se sentant pas prête
pour aborder la scène, refusa, au grand désespoir de son
professeur. Elle revint à Alger pour préparer le répertoire
avec le chef d'orchestre Aimé Kunc. C'était la sagesse même.
Mais tout ne sera que sagesse, calme réfléchi, pondération,
prudence même, chez cette jeune artiste dont l'ascension régulière
fut surprenante et par cela rapide.
Débuts à Alger
Elle débute dans Marguerite de "Faust" à
l'Opéra d'Alger sous la direction de Victor de Cottens, au cours
de la saison 1929-30. Elle chante également "Hérodiade"
et "Thaïs". C'était des débuts timides, la
comédienne était encore mesurée. Mais sa voix de
soprano lyrique était ravissante, s'étalant dans l'aigu.
Si le médium et le grave étaient légers, le timbre
d'une couleur personnelle, amenait des demi-teintes ravissantes. La beauté
de l'actrice aidant, on pouvait spéculer favorablement sur son
avenir.
Une ascension méthodique
Prunet, directeur de l'Opéra de Marseille, l'engage pour trois
ans. C'était la coutume à l'époque quand l'artiste
en valait la peine. Elle allait aborder le difficile public marseillais
et eut le sentiment de ses vrais débuts dans Mathilde de "Guillaume
Tell". Seule en scène pour l'air difficile de "Sombres
forêts", la jeune Algéroise a été marquée
par le sceau du "trac" qui étreint les plus grands artistes,
ce "trac" qui ne la quittera plus jamais et qui est la preuve
évidente du talent. Elle travaille de pied ferme, augmente son
répertoire et chante dans les théâtres de Montpellier,
Nimes, Avignon, Perpignan qui dépend de Marseille.
Dès 1933, elle paraît au Grand Casino de Vichy où
elle retournera à peu près tous les ans. Elle aborde la
Tétralogie wagnérienne dès 1933 à Marseille.
Elle est Sieglinde dans la "Walkyrie" aux côtés
de Marjorie Lawrence (Brunehilde).Son contrat terminé, c'est Bordeaux
qui la réclame. Elle chante "Louise" sous la direction
de Gustave Charpentier qui lui dédicacera sa partition. Elle a
pour partenaire le célèbre ténor Lauritz Melchior
dans la "Walkyrie". Ce sera ensuite l'opéra de Lyon et
toutes les villes qui possèdent un théâtre digne de
ce nom.
A Toulouse, elle profite de travailler sa voix avec le célèbre
professeur Claude Jean, qui vient de mourir et dont tous les chanteurs
me parlent, et se perfectionnera encore avec Mme Fourestier, femme du
chef d'orchestre, à Saint-Cloud.
A partir de ce moment, Mme Olivier-Sportiello est attendue partout en
représentation. Sa voix s'est épanouie, son talent affirmé.
Elle est Manon, Mimi, Rozenn, s'attache au rôle de Floria Tosca
dont elle deviendra une des plus remarquables interprètes françaises.
Elle sera aussi Elsa de "Lohengrin", Elisabeth de "Tannhauser",
Desdémonde d'"Othello"
/
(2)
Notes :
a) Certains noms où prénoms de la première partie
de l'article sont illisibles, quasi illisibles ou changés. Ils
sont marqués d'un *
b) (2) A mon grand regret, je n'ai que cette première partie
de l'article / RP.
Article (partiel) de M. Louis Eugène ANGELI, paru dans un
journal algérois (1) dans les années 1960.
(1) Je ne peux préciser devant le manque d'informations si
cet article était de la Dépêche ou de l'Echo d'Alger
ni la date exacte de sa parution / RP) |
|
|
|
PERRIN Clément, Jean
Artiste- Musicien
Epouse: née Gabrielle, Paule LIAUTAUD
ancienne adresse: 10, rue Mogador
Titres et décorations: Professeur au Conservatoire d' Alger
- Soliste de Radio-Alger- Officier de l'instruction Publique - Médaille
de Serbie - Médaille d' Orient (1914/1918) - Médaille du
Travail (Alger) Engagé par la Municipalité d' Alger comme
soliste grand orchestre 1° octobre 1906 - A quitté Alger fin
juin 1962 - Auteur de 15 Etudes Transcendantes pour trompette et Précis
de théorie musicale - Adhérent de la Societé des
Auteurs et Compositeurs, la SACEM.
(Crédit: Livre d' Or des PN) |
|
|
|
Clément PERRIN en 1930. |
|
JEAN-PIERRE MATHEZ
Clément Perrin (3.7.1876-4.12.1970)
II vécut à la charnière du XXe siècle.
« Au loin, sur un monticule, un clairon sonne : un clairon de France. Les notes argentines s'éploient dans le calme du soir qui tombe. Tout le monde s'est tu […] Ce clairon est un artiste, piston solo d'Alger. il est maître de ses effets […] Ces airs égrenés dans la nuit, tels qu'on en chante aux veillées de villages, font danser dans nos mémoires des paysages de la vieille France […] »
Cet artiste qui émeut si profondément ce reporter, c'est Clément Perrin durant sa mobilisation sur le front oriental de la Guerre 14-18, un trompettiste au destin privilégié.
Clément Perrin est né à Carcassonne le 3 juillet 1876. II suit la filière traditionnelle : une année de solfège, puis à 10 ans, les débuts au cornet a pistons. En mars 1897, il s'engage comme volontaire à la Musique de l'Ecole d'artillerie au 23e Régiment d'Artillerie à Toulouse, II trouve dans cette ville un éminent professeur de trompette, Joseph Albus avec lequel il travaillera au Conservatoire de Toulouse jusqu'a l'obtention, en 1900, d'un premier prix de trompette et de cornet à pistons à l'unanimité, d'une première médaille de solfège et d'un diplôme de capacité pour l'enseignement musical. Libéré du service militaire actif, il travaille par-ci par-la jusqu' en octobre 1906 qui sera une année décisive pour sa vie, II se marie à Perpignan et trouve son premier engagement de « piston » solo a l'Orchestre municipal et au Théâtre municipal d'Alger. Il réalisera une carrière exceptionnellement longue puisqu'il ne prendra sa retraite de trompette-solo qu'en 1957, à l'âge de 81 ans. Cette retraite, il l’a ponctuera d'ailleurs par une prouesse qui laisse pantois : avec son fils Marcel il interprète en un dernier concert public le « Concerto pour trompette, saxophone et orchestre » de Jean Rivier (Édition Billaudot. Paris). Le presse française d'Alger ne tarira pas d'éloges : « […] Marcel Perrin, saxophoniste de grand talent et son père, Clément Perrin, valeureux trompettiste dont les 81 ans sont l'objet de notre admiration […] (L'Echo d'Alger). Ces deux artistes […] nous ont donné une fois de plus une brillante démonstration de leur talent […] (Dernière Heure) […] Clément Perrin a témoigné là de sa curiosité toujours en éveil le long d'une belle carrière de cinquante ans […]. »
C'était également le dernier concert public de la saison de l'Orchestre de Radio-Algérie (sous la direction de Jean-Louis Joubert).
Mais revenons a Alger au début du siècle. Clément Perrin fonde sa famille et se fait le métier. La Revue Nord-Africaine Illustrée du 27 décembre 1908 parle de Clément Perrin en termes dithyrambiques, relevant également ses succès de compositeur : « […] Ce furent encore maintes chansons et romances délicates et subtiles dont quelques-unes d'un succès fabuleux (une récente valse « Si j’ai rêvé » a été tirée à 250 000 exemplaires !) […] Puisse sa renommée grandissante ne pas l'éloigner trop tôt de nous ! […] »
Clément Perrin ne quittera Alger qu'en juillet 1962, à l'indépendance de l’Algérie, et retournera Toulouse.
Un autre journal algérien parle de Clément Perrin comme étant toujours sur la brèche, [il] supporte presque tout le poids des programmes d'été si l'on en juge par le très grand nombre de solos qui lui sont confiés et par la sûreté et le goût qu'il montre dans leur exécution […].
En août 1914, il est mobilisé au 2e Bataillon territorial de Zouaves d' Alger. En 1915, il est dirigé sur le front oriental (Egypte, Grèce, Bulgarie). Le 24 février 1917, à un retour de permission, le bateau anglais qui le transporte,le « Dorothy », est torpillé au large de l’île de Pantelleria et dirigé sur Salonique le 18 mars 1917, il est rapatrié à Alger le 3juin 1918 et sera démobilisé en février 1919.
La paix retrouvée, il est « piston »-solo au Nouveau Théâtre Kursaal (1919-1924), puis à l’Association des Concerts d'Eté et au Théâtre municipal jusqu'en 1930. Dès 1931 (il a 55 ans !), il est nommé soliste au grand orchestre de Radio-Alger, poste qu'il ne quittera que par application de la limite d'age à 81 ans !
La « Compagnie Française du Gramophone» a enregistré Clément Perrin entre 1934 et 1940 environ. Sur son dépliant publicitaire, elle relève : « […] Clément Perrin est un cornettiste de haute envergure qui joue avec sentiment, sa sonorité est suave, d'une captivante richesse, pleine et pure et sa technique, celle d'un virtuose accompli, mais d'un virtuose ébouriffant qui se joue des pires difficultés. »
Clément Perrin a enseigné au Conservatoire, à la Société des Beaux-Arts et dans les écoles communales de la Ville d' Alger.
Les Editions Leduc (Paris) ont toujours au catalogue ses « 15 Etudes transcendantes et 6 Préludes de grande virtuosité ».
Auteur des succès d'avant-guerre [14-18] : "Si j'ai Rêvé», « Reviens ma Castillane » etc., de nombreux morceaux pour orchestre a l'usage des cinémas, de Polkas de concert pour cornet à pistons et de répertoires pour orchestre Si Bemol [sic] (Dépliant Compagnie Française du Gramophone).
Terminons le portrait de ce musicien attachant par ke témoignage qu'il écrivit lui-même a la suite d'un concert auquel il participa le 27 avril 1920 à la Société des Beaux-Arts d'Alger ou fut donné le « Septuor » de Camille Saint-Saëns avec le compositeur au piano :
« Saint-Saëns abritait derrière sa barbe carrée un caractère caustique, rude dans ses appréciations. II ne s'embarrassait pas des formules qui enveloppent douillettement les critiques trop acerbes, pour être exprimées nues.
Nous répétions un jour le Septuor avec Trompette chez le pianiste Llorca ; arrivés à l'Andante je vis Saint-Saëns (place près de moi) s'agiter nerveusement, froncer les sourcils, remuer sa canne et finalement frapper le plancher en criant de sa voix aigrelette : « C'est pas ça ! C'est pas ça ! C'est pas ça ! » Nous nous arrêtâmes à l'appel réitéré de la canne et fîmes un silence respectueux. Le Maître nous dit : « 1-2 ; 1-2 ; 1-2 ; 1-2 voyons ! c'est de l’Alphabet cela ! et sans ménagement aucun, il nous fit le reproche de ne pas être à notre aise quand on décompose les temps. Nous recommençâmes et tout alla pour le mieux. A la fin, conscient d'avoir été un peu brutal, il s'excusa, mais nous dit cependant : « La mesure est une et divisible contrairement à la République que l'on dit une et indivisible. »
reportage d' André Tudesq, journal français non identifié, un 20 juin entre 1915 et 1918.
dont les «Etudes Transpositrices à l' usage de la Trompette» sont toujours éditées chez Selmer 11 Paris.
En France, on disait souvent «piston» pour un cornettiste ou même pour un trompettiste. Aujourd'hui, cette appellation est tombée en désuétude.
Marcel Perrin, saxophoniste virtuose, aujourd'hui établi à Mougins près de Nice en France.(dcd en 1996)
Septuor à cordes avec piano et trompette.
|
|
|
|
1959
en direct de la salle Pierre Bordes et retransmit par la télé
d' Alger, Clément, Lyse et Marcel Perrin interprètent le
concerto pour trompette et saxophone de Rivier. |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Documents fournis par Frédéric Luc ANTOINE dernier Premier Prix de Marcel Perrin au Conservatoire d'Alger, le 14 juin 1961 ... |
|
|
1957 Marcel et Suzanne PERRIN en répétition. |
|
|
|
Collection Georges COTTIN |
|
|
|
|
|
|
II: Scherzo Marcel PERRIN - Cliquer sur le microssillon pour écouter. |
I: Pitreries Semler Collery - Cliquer sur le microssillon pour écouter.
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|