Après ce dur exil, cest à peine si
jose
Te dire, Alger ma Ville, nous sommes en osmose
Pardon, pardon ma « Blanche » de tavoir investie,
Architecte un peu fou de rêves et dinepties !
Les vaisseaux de mon corps, à lancre de ma jetée,
Sont les navires de ton port face à lAmirauté.
Mes veines et mes veinules sont tes rues, tes ruelles,
Je les sens battre, sourdre, vivantes, perpétuelles :
Arago, Berthelot, Chartres, Pasteur, Batandier
Des centaines à coup sûr désormais répudiées
!
Mes artères sont Isly, Baudin, Lyon, Carnot,
Dautres et dautres encore
Le sang de mes canaux
Irriguent banlieues, quartiers : La Marine, Champ de manuvre,
Ben Aknoun et Kouba, Basséta « Le chef duvre
» !
Le cur de Bab-el-oued étonné, minterroge
Le temps a-t-il cessé à lheure des « trois horloges
» ?
Tes jardins sont présents en tatouages internes,
Je my promène souvent, nostalgique, lâme en berne
Pourtant le Frais Vallon, Nelson, Laferrière
Resplendissent toujours, écrasés de lumière.
Le sable de tes plages granule sous ma peau
Et je lentends crisser quand je suis en repos
La Pérouse, Matifou, Zéralda, Pointe Pescade !
Le bain étant prétexte à la moindre escapade
Pour un peuple joyeux, coloré, animé,
Doré par ce soleil quil a tant et tant aimé
Mes côtes sont les tiennes, est-ce une métempsychose ?
La mer est mon humeur, jy perçois toutes choses
Sereine, alanguie, caressant tes rivages,
Emu au souvenir de ces douces images
Violente et déchaînée, ivre, blasphématoire,
Battant mes flancs pour flageller lHistoire !
Jai gardé tes senteurs, de la menthe à lanis,
Elles sexhalent par mes pores que nulle effluve dénie
Et puis, il y a les sons dont mes oreilles bourdonnent,
Les rires, les pataquès, les surnoms que lon donne !
« Se taper la kémia ac les escargots »,
« Descendre en bas le port », « Va de là, falampo
» !
Folklore dun peuple ! Original lexique
Enfoui dans ma mémoire comme une pieuse relique !
Des clichés infinis de la vie dautrefois
Tapissent mes arcades, mon subconscient fait foi !
« LHarrach et son marché », « Fort de lEau,
ses brochettes »,
« La Casbah, ses bordels », « rue Michelet, la cafète
», !
« La Pêcherie, ses poissons », « Rovigo, ses tournants
»,
« Bab-el-oued , ses nuits chaudes », « La loubbia cher
Fernand » !
« Mingasson », « Télemly », « Le
stade et la piscine »,
« Le Duc dAumale et Bugeaud », « El-biar, les
Glycines »,
« Saint-Eugène, le cimetière », « Belcourt
», « LArsenal »,
«Baïnem, la forêt », « Mustapha, lhôpital
»,
« Les chalutiers », « Les barques », « les
yoles du Sport nautique »,
« LEsplanade » et bien sûr, notre « Dame
dAfrique »
..
Elevé par tes soins dans une foi idolâtre,
Je suis comme toi, bâti sur un amphithéatre
Tu cernes par mes bras, la plus belle des baies,
Vision du « Grand Départ », sur ma rétine gravée
Excuse-moi, lecteur, mon âme sest engagée
Dans les rues de mon cur pour me parler dALGER
Etienne MUVIEN
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